L’amorce de la guerre…

La période d’avant-guerre s’étendant de 1936 à 1939 est une période qui montre la fragilité de la paix.
Cela avait commencé par la réoccupation de la Ruhr en mars 1936, puis par le déclenchement de la guerre civile espagnole en juillet 1936 où avait été essayées beaucoup d’armes utilisées pendant la guerre par Hitler.
Arrive mars 1938 l’Anschluss (annexion de l’Autriche). Hitler s’enhardissait toujours du fait du manque de réaction de la France et de l’Angleterre. En septembre 1938, se déclenche l’affaire des sudètes qui se termine par Munich, puis en mars 1939, l’invasion de la Tchécoslovaquie et la création de l’état slovaque. Enfin, l’invasion de la Pologne.

Déclaration de guerre du 2 septembre 1939.

Toute cette escalade pour aboutir à la guerre rendue possible par l’absence de réaction de la France et de l’Angleterre. La France était pacifiste. L’opinion s’accrochait à la paix à tout prix, ne voulant plus que se renouvellent les boucheries de 1914-18, mais les plus lucides se rendaient compte que cela finirait par la guerre.
Au Juch, cela se traduisit par le maintien sous les drapeaux des classes 36 et début 37 libérables. A chaque crise, il y avait rappel des réservistes et en plus maintien sous les drapeaux des classes démobilisables. Il est arrivé que des soldats de ces deux classes aient porté l’uniforme 9 ans de suite en incorporant le temps de prisonnier, tels René QUINIOU, Yves MANUEL.

Septembre 1939

Le pacte germano-soviétique du 22 août 1939 a provoqué l’accélération vers la guerre déclarée le 2 septembre 1939. A partir de ce pacte, l’appel des réservistes s’est accéléré et au 2 septembre beaucoup de jeunes étaient sous les drapeaux : mobilisation générale suivant l’ordre d’appel du fascicule.
Au Juch, comme partout ailleurs, la mobilisation s’est faite jusqu’à 48 ans pour ceux qui n’avaient pas de charge de famille.
Quelques-uns d’entre eux avaient fait la guerre de 1914-18, dont Pierre PHILIPPE de Kergouenec (48 ans) et René JULES du Rhun (41 ans), tous deux mobilisés à la Poudrerie de Pont-de-Buis et Louis PHILIPPE (43 ans), marchand de beurre, secrétaire de mairie, mobilisé avec sa camionnette réquisitionnée à Vannes.

1 mort du Juch

Tout ce monde mobilisable avait été ramassé sans aucune utilité puisqu’il n’y avait pas d’opérations militaires. La guerre se résumait à « nuit calme sur l’ensemble du front. Quelques tirs d’artillerie de part et d’autre, activité de patrouille ». Pourtant, au Juch, il y eut un tué en septembre 1939 dans la Sarre, Pierre PELLEN du bourg. Il sera d’ailleurs le seul tué de septembre 1939 à juin 1940.
Certaines maisons ou fermes se sont complètement vidées et certaines familles avaient jusqu’à 6 mobilisés (LE COZ à Kermenguy). Cette mobilisation provoque une absence de main-d’œuvre dans les fermes et chez les artisans, les camionnettes et les motos étant réquisitionnées.
Faute d’opérations militaires, on s’installe dans la drôle de guerre avec promulgation des règles de la défense : à partir d’une certaine heure, tous les volets devaient être fermés ; les vitres des fenêtres dépourvues de volets devaient être teintées en bleu.

Hiver 39-40

Drôle de guerre
Au début de la guerre, les moissons étaient finies, restaient les récoltes de pommes de terre et de blé noir et plus tard les semailles.
Par pénurie de main d’œuvre, beaucoup de jeunes arrêtent l’école pour aider à la ferme et faire souvent un travail d’adultes encadrés par des personnes âgées.
Puisqu’il n’y avait pas d’opérations militaires, on accordait facilement aux plus âgés des permissions.
D’un autre côté, c’était la course à l’affectation spéciale. Le but était de maintenir sur place les spécialistes afin d’exercer leur métier chez eux. Ils se faisaient traiter d’embusqués, mot à la mode.

10 mai 1940

L’offensive allemande
Au bout de 40 jours, tout était fini, la France était envahie au trois-quarts. Pendant ces 40 jours, en même temps que les armées défaites, un énorme flux de réfugiés encombre les routes et marche à l’aveugle. La moitié de la France se déplace dans l’autre moitié : un chaos !
Le Juch reçoit aussi des réfugiés : d’abord ceux qui ont de la famille, d’autres hébergés dans des maisons particulières. Mais il y avait moins de réfugiés que dans d’autre régions.
Les écoles ont fermé début juin. La mairie avait requis des jeunes filles pour préparer le manoir de Lanivit à recevoir des réfugiés, mais ils ne sont jamais venus.

Les 30 et 31 mai,

Il y eut « Gouel ar Galon Zakr ». Pâques se situe tôt cette année-là. Mai, juin, juillet se sont déroulés dans un désordre total.
Les communications étaient coupées, rien ne fonctionnait. La vie économique était complètement perturbée. Certains se rappellent avoir couru pour trouver du pain jusqu’à une petite boulangerie, à la gare de Guengat, pain fait avec du levain naturel faute de levure.
Les familles n’avaient aucune nouvelle de leurs mobilisés, ne sachant ce qu’ils étaient devenus. Puis petit à petit, à partir du mois d’août, les nouvelles sont venues, la plupart étaient prisonniers. D’autres ont pu faire retraite jusqu’en zone libre, d’autres encore s’étaient évadés, tels G. MAREC évadé de la caserne de Quimper, R. NEDELEC évadé dans l’est. Certains avaient été pris près de chez eux, F. LE BOT à Lorient, V. LE COZ à Vannes. D’autres seront rapatriés pour raison sanitaire comme E. GLOAGUEN, grand blessé.
La grande majorité des prisonniers fera route pour l’Allemagne.
Fin août, le 31, J. GOURLAY rentre de zone libre et chose presque unique, il y eut des blessés dans la bataille de France, mais pas de tué pour le Juch. 

Réquisition

Cela avait commencé par la réquisition de tombereau avec cheval pour faire des transports pour l’occupant. Par exemple, le transport de la gare de Douarnenez à la Kommandatur de Ploaré de diverses marchandises, transport de marchandises de Plogastel à Douarnenez ou dans l’autre sens.
Les réquisitions étaient fréquentes. Une anecdote lors du transport de charbon de la gare à Ploaré : le cheval refuse de monter la côte estimant qu’on l’a trop chargé. L’Allemand fait décharger la moitié, quitte à venir le reprendre. Oui, mais quand il est venu le reprendre, tout le monde s’était servi.
Les Allemands faisaient part à la mairie de leurs exigences, au maire de les satisfaire.
Puis, vinrent les réquisitions d’attelages pour construire le mur de l’Atlantique. Il fallait prendre du gravier à Kervel pour le monter sur les hauteurs pour la construction de casemates. Et enfin, les réquisitions d’hommes pour creuser le fossé anti-char de 2,5 à 3 mètres sur une ouverture de 5 à 6 mètres ou plus pour empêcher les chars de passer. Cela dura jusqu’au débarquement. Les nominations « Da labourad d’ar Boche » se faisaient le dimanche après la basse-messe. Louis PHILIPPE montait sur la croix du placître et nommait les hommes pour la semaine : 15 à 20 hommes par jour.

Le contrôle d’identité

L’Allemand faisait l’appel au regard de la liste. Il suffisait de répondre « présent ! » au nom appelé. Aucun contrôle d’identité n’était fait, ou alors s’il était absent, tout le monde disait « Krank !». N’importe qui pouvait remplacer n’importe qui et physiquement ce n’était pas l’élite qui était fournie. Ce fossé avait une certaine continuité, il était adapté au terrain et complété de trou d’hommes en certains endroits. Certaines prairies furent inondées et transformées en fondrières. Tout cela sous la surveillance des Allemands cantonnés au bourg. Il fallait assez souvent miner la roche.
Vers la fin, avant le débarquement, les Allemands devenaient de plus en plus fébriles.

La défense ce mettent en place

Ordre était venu de planter des pieux dans des parcelles susceptibles de recevoir des planeurs. Les pieux étaient à prélever au Coat-pin de Lézarlé.
IL y avait eu une certaine forme de résistance pour entreprendre ce travail. Tout était vite rentré dans l’ordre à la suite de l’installation par les allemands d’une mitrailleuse au bout de la route de Coat ar Yeuc’h en présence et sous la responsabilité du maire.
Dans les derniers jours de l’occupation, 3 ou 4 tombereaux furent requis pour transporter des Allemands avec leurs affaires à Langolen.

Puis vint la Libération, attristé par l’assassinat des KERVAREC père et fils le 2 août, Le Juch s’en serait bien tiré sans ce tragique événement.

L’occupation

C’est au printemps et en été 1940 que le manque de main d’œuvre s’est fait le plus ressentir. La fenaison avait été faite par des adolescents encadrés par des anciens qui pour la plupart avaient fait la guerre 1914-18. Heureusement, le temps avait été beau. La moisson s’était faite dans des conditions identiques, mais la solidarité jouait à plein pour ces jeunes qui faisaient un travail d’adultes.
Puis, petit à petit, à partir de fin août, les mobilisés de la zone libre qui avaient échappé aux Allemands, rentraient (J. GOURLAY était rentré le 31 août 1940). Certains prisonniers étaient libérés pour raisons sanitaires ou autres.
Les jeunes s’aguerrissaient et le problème de main-d’œuvre devenait moins brûlant.
Les Allemands occupant le pays au début, étaient « korrects ». Ils se considéraient en « villégiature » aux frais des Français. Le pillage économique s’organisait en haut lieu.
Les choses sérieuses commencèrent pour l’occupant à la déclaration de guerre avec l’URSS (21/06/1941).

Les prisonniers

Les combats de mai-juin 1940 se sont terminés par la capture par les Allemands d’un peu moins de 2 millions de prisonniers, en majorité pris dans le Nord et l’Est, mais aussi dans les dépôts de l’Intérieur (Quimper, Lorient, Vannes, Brest), certains n’avaient pas été dans la zone des Armées.
Quelques-uns se sont évadés tout de suite, tels R. NEDELEC, G. MAREC. D’autres furent libérés pour raisons sanitaires ou autres. Le reste pris la direction de l’Allemagne sans se rendre compte que c’était pour 5 ans.
Ils durent attendre pour les premiers libérés, mars-avril 1945 au fur et à mesure de l’avance des Alliés. Ceux qui furent libérés par les Russes rentrèrent plus tard. Le premier rentré au Juch fut Corentin QUEAU au début d’avril, le dernier fut J. LE BOT du Credo en août qui avait été baladé en Russie pensant rentrer par Odessa. René LE GRAND de Kernezet était dans la même situation, rentré un des derniers, libéré par les armées soviétiques.

L’angoisse des famille

Elles n’étaient souvent averties que la veille sans avoir reçu signe de vie des leurs depuis des mois ou des années. Certains d’entre eux avaient souffert : ceux qui avaient fait les camps de représailles ou travaillé dans les mines de sel. Pour le dernier rentré, tout Kermenguy descendit au bourg et fit sonner les cloches à toute volée.
Ils retrouvaient leurs familles, pour certains, leurs enfants étaient passés de l’âge d’enfant à l’âge adulte. D’autres découvraient leurs enfants qu’ils n’avaient jamais vus, tel H. JONCOUR.
Les prisonniers en Allemagne pouvaient recevoir des colis, mais c’est eux-mêmes qui devaient transmettre le bon d’expédition ; de cette façon l’Allemand contrôlait tout. Au Juch comme ailleurs, il se constitua un comité d’aide aux prisonniers, dans le but de conseiller et d’aider à la confection des colis et de régler tous les problèmes administratifs.
Cette œuvre se chargeait de réunir le nécessaire pour aider à la confection des colis en complétant l’apport des familles afin que tous aient à peu près des envois identiques. Une famille avait 4 prisonniers (LE COZ), une autre 3 (LE BIHAN), beaucoup 2.
Le comité se réunissait une fois par mois à l’école des sœurs, sous la présidence de Madame LE LANN, institutrice, dont le mari était captif. Celle-ci était aidée par beaucoup de bénévoles pour ce travail. Le comité avait des priorités pour avoir des produits dans une association départementale. Les familles amenaient les tickets reçus et participaient également.
En septembre 1942, le comité organise une kermesse dans le pré du Rosaire à la gare, dans le but de se procurer des fonds pour financer cette œuvre. Le succès fut très grand, le Juch se montra très généreux.

Les maquis

Les classes 1940-41-42 étaient requises pour aller travailler en Allemagne. Pour les classes 1940-41, seuls les spécialistes étaient concernés, par contre la totalité de la classe 1942 était requise.
Par le fait de ne pas obéir, ils devenaient réfractaires et étaient obligés de se cacher.
Dans le Stang vras, beaucoup de fermes avaient des S.T.O. : trois à Kerarneuf (L. QUEINEC, C. BOURHIS, J. MAO); deux à Kerflous (H. QUINIOU, R. KERSUAL); un à Tal -ar-Roz (LE BRUN); un à Lanalem (H. HASCOET) et un au Merdy (P. GALL). Certains d’entre eux ont passé deux hivers, tels L. QUEINEC, P. LE GALL.
Puis petit à petit, la résistance organisée se met en maquis, du fait de la répression, pour s’y cacher. A ces premiers maquisards sont venus s’ajouter les volontaires désirant combattre.
A Kerarneuf, le maquis était déjà constitué avant le débarquement. C’était très bien organisé, très sérieux.
C’est après le débarquement que les volontaires affluèrent à Lanalem, Rulosquet, au Rohou, ceux-ci étaient beaucoup plus imprudents.
Il est arrivé que des réfractaires du S.T.O. aient travaillé au fossé anti-char. Par exemple, LE GALL se faisait passer pour GENTULUS.
Dans le contexte que nous avons connu et avec le recul des années, on frémit devant le risque qu’avaient pris les propriétaires fermiers qui hébergeaient ces maquis. Les maquisards pouvaient s’en aller, les propriétaires devaient rester face aux Allemands. Les événements à Kerarneuf et surtout à Lanalem de par les imprudences commises se sont finalement assez bien terminés. Ce mérite-là a été longtemps occulté.

Les maquis ont leur origine dans l’institution par les Allemands, au début de l’été 1942, du S.T.O.(Service du Travail Obligatoire).

Le groupe Catroux du Juch, section de la compagnie Kléber de Douarnenez, appartenant aux Francs-Tireurs Partisans (FTP). C’est Jean Nédelec, faisant déjà partie des FTP de Quimper, qui créa cette section juchoise, en janvier 1944. Le groupe participa à tous les combats de la région, ceux de Douarnenez du 4 au 8 août 1944, ceux du 25 août à Beuzec-Cap-Sizun, ceux de la presqu’île de Crozon en septembre, où ils furent les premiers à entrer à Lanvéoc. Sur la photo, de gauche à droite : René Nédélec, Laurent Sacart, Jean Nédélec et un nommé Nicolas.
Le maquis FFI de Kelarne (Kérarneuf), composé de nombreux réfractaires, dont certains venaient de loin.
Le maquis Marceau des FFI (Forces Françaises de l’intérieur), basé au Juch, photographié en 1944, à la Libération. On y voit, entre autres, Michel Ascoët, Lannig Dilosquer, André Sylvestre, André Cariou, Jean Hénaff, Yves Pensec. Sept d’entre eux ont trouvé la mort pendant les combats.