St Mahouarn à travers les siècles

Eléments de chronologie

Vers l’an 1200 avant JC les peuples de culture celte sont installés en Europe Centrale.

A partir de 800 avant JC débute la période dite de Hallstatt ou Âge du fer (couleur vert foncé) qui correspond à l’apparition de la métallurgie du fer en Europe.

Vers 250 avant JC ils occupaient à leur apogée les territoires de l’Europe actuelle, de la Grande Bretagne à l’Espagne jusqu’au Moyen-Orient (couleur vert clair).

Les Romains combinant des stratégies militaires bien rodées et une diplomatie efficace surent exploiter la division des peuples celtes, les vaincre quasi totalement hormis l’Irlande et les Pictes au nord de la Bretagne insulaire.

L’Empire romain connut son apogée territoriale en 192 après JC jusqu’à l’assassinat le l’empereur Commode, limité au nord par les fleuves Rhin et Danube, à l’Est le fleuve Euphrate et au sud le désert du Sahara.

Vers l’an 410, submergée sur ses frontières, Rome rappela les légions basées en Bretagne insulaire pour défendre l’Empire contre les invasions germaniques et hunniques. Ce retrait brutal des légions romaines permit aux Scots, Pictes et Germains (Saxons, Jutes et Angles) de réduire la zone d’influence bretonne à l’ouest de la Bretagne insulaire.

Certains de leurs peuples déjà en étroite relation avec la Gaule armoricaine accentuèrent leur implantation sur le continent. En quelques décennies au VIè siècle, les contemporains qui parlaient jusqu’alors de l’Armorique ne parlèrent plus que de la Bretagne.

Par manque de source écrite, les historiens n’ont toujours pas clairement établi comment en si peu de temps, la langue bretonne, l’administration et les armées bretonnes s’imposèrent sur un si vaste territoire. Ces peuples bretons devinrent conquérants et forgèrent en l’an 851 le Royaume de Bretagne au détriment de leurs puissants voisins carolingiens.

Le culte de Mahouarn

Saint-Mahouarn n’a pas d’hagiographie mais des traces de son culte subsistent encore de nos jours. Elles se situent toutes dans le Porzay. Il ne lui est pas connu de lieu de dévotion ailleurs que dans le Porzay.L’Eglise, urbaine et épiscopale à ses débuts, établit du VIè au IXè siècle un clergé paroissial. L’évêque de Cornouaille éleva au statut de parrochia le lieu de culte du vicus de Plomodiern, paroisse primitive consacrée sous le patronage de Mahouarn.

Trois autres lieux de culte alors simples oratoires ruraux privés (lieux de prière) furent ultérieurement enrichis d’une chapelle.Il est remarquable que ces quatre lieux de culte délimitent géographiquement le pagus minor Porzoed appelé de nos jours le Porzay.Trois sites à l’ouest dominant le front maritime en fond de baie de Douarnenez au Juch,  à Plomodiern et à Plonévez-Porzay.

Un site au Nord-Est de la paroisse de Cast au plus près de Châteaulin à la frontière du Vicomté du Faou dans la trouée montagneuse entre la chaîne du Menez Hom et le Menez Quelc’h.Partout ailleurs le Porzay est naturellement limité par des chaînes montagneuses du Menez Hom au Nord, de Locronan au Sud et du Menez Quelc’h à l’Est.

Cette implantation géographique des lieux suggère une prise de possession d’un territoire par un dominus laïc, du besoin d’en contrôler et protéger les accès maritimes et terrestres à l’instar du rôle joué dans la défense côtière par l’abbaye de Landévennec dont les fortifications furent détruites par les Scandinaves en 913.

Légende : En bleu les cours d’eau, en orange les voies antiques (communément appelées voies romaines), en pointillés noirs les limites du pagus minor Porzoed. Les croix positionnent les lieux de cultes de Mahouarn

Ces sites pourraient être non pas le lieu d’un castellum, mais un lieu de garnison en charge de la surveillance côtière, à proximité de promontoires, tels ceux de Goulit-ar-Guer en Plomodiern, de Beg-an-ty-gard et la pointe de Tréfuntec en Plonévez-Porzay.

De plus nous remarquons qu’ils se situent à proximité de jonctions des voies antiques traversant le pagus minor Porzoed permettant également une surveillance des voies de communication.

La mémoire collective conduisit à la sacralisation de ces lieux.

Plomodiern, transcrit « Ploemadiern » en 1223 et 1229 dans le cartulaire de l’église de Quimper (1201-1400). Etymologiquement Ploe-maw-tiern ou paroisse de l’homme (sens de grandeur et force morale) chef. Donc un « Plo » suivi d’un nom commun « le grand chef ».

Mahouarn, ainsi transcrit dans les actes de baptême, de mariage et de sépulture est un prénom attesté en Porzay jusque dans les années 1850.

L’étymologie la mieux assurée est Maw-hoiarn ou Homme (sens de grandeur et force morale) de Fer.

A l’époque de la création des paroisses, il s’agissait d’un nomen souvent transmis de génération en génération par les lignages des familles dominantes, traduisant des liens biologiques ou vassaliques. Par exemple le lignage du Vicomté du Faou (terres entre Aulne et Elorn) alterne au XIè siècle les nomina Ehuarn et Morvan.

Les cartulaires des abbayes bretonnes mentionnent des chefs laïcs (tierns et machtierns) ou religieux tels que Marchoiarn (Redon en l’an 876), Trihoiarn, Deurhoiarn, Mohoiarn (Vannes en l’an 1130).

Les tierns existaient encore au XIè siècle puisqu’ils participèrent à la rébellion du Vicomte du Faou Morvan contre le comte de Cornouaille Alain Canhiart peu avant son décès en l’an 1058. Les tierns se rebellèrent à nouveau contre son fils Hoël vers 1060/1080.

En ce qui concerne le site de Landanet au Juc’h alors trêve de la paroisse primitive de Ploaré, la présence d’un site dévoué à saint Mahouarn laisse à penser que le pagus minor Porzoed s’étendait alors jusque sur les hauteurs de la rive gauche du Névet.

L’intégration de cette rive gauche du Névet à la paroisse primitive de Ploaré semble démontrer l’antériorité du culte de saint Mahouarn à la création des paroisses primitives et le positionne plus près du VIè siècle que du IXè siècle.

La concordance des périodes temporelles, la similitude des nomina des lignages détenteurs de l’autorité publique, l’espace géographique et le positionnement stratégique des lieux de culte  rendent  plausible que Mahouarn fut un membre éminent sinon le laïc fondateur du lignage des tierns/machtierns du pagus minor Porzoed, le Porzay de nos jours.

Ermitage, fontaines, statues, calvaires et chapelles Saint-Mahouarn

PLOMODIERN :

Le saint patron de la paroisse de Plomodiern est saint Mahouarn, son pardon est fêté le 3ème dimanche du mois de septembre.

Plomodiern est une paroisse primitive, dont le lieu de culte fut consacré par l’évêque de Quimper entre le VIè et le IXè siècle, période de christianisation des zones rurales.

 La fontaine Saint-Mahouarn située au bas de la rue de la fontaine comporte une niche dans laquelle se trouve une statue de saint Mahouarn.

Une bannière et un cantique Saint-Mahouarn lui sont également dédiés.

LE JUC’H :

Au village de Landanet en bordure du Kergouinec affluent de la rive gauche du Nevet qui limite au Sud le Porzay, une chapelle dédiée à Mahouarn est desservie au moins jusqu’en 1761 (comptes de fabrique du Juch).

Les ruines de la chapelle existaient encore au début du XXè siècle. Les pierres remarquables furent réemployées pour construire la maison d’habitation de la ferme.

Dans les années 1950, les personnes du lieu réalisaient toujours un parcours de dévotion depuis la chapelle jusqu’à la fontaine-source monumentale Saint-Mahouarn.

PLONEVEZ- PORZAY :

Au village de Lesvren, une chapelle dédiée à Mahouarn est avérée au XVIè siècle. Un texte en latin daté de 1518 confirme que les habitants dénommaient cette chapelle Saint-Mahouarn alors que l’Eglise lui substituait le culte de saint Hervé: capellae sancti Herveii, vulgo dicte sancti Maihouarn.

A la chapelle Sainte-Anne-la-Palud, la statuaire de l’arc de triomphe de l’entrée sud expose le groupe de Saint-Hervé qui provient de la chapelle Saint-Mahouarn de Lesvren, il est encore appelé de nos jours « paotr saout lesvren ».

A l’intérieur de la chapelle Sainte-Anne-La-Palud, on peut aussi admirer une baie dont le vitrail est dédié à saint Mahouarn.

CAST :

Au Nord-Est de Cast au village du Loc’h et aux abords de Châteaulin, l’existence d’une chapelle est avérée au lieu encore appelé Loc Mahouarn au XIXè siècle. Les registres paroissiaux de Cast mentionnent la bénédiction de nouvelles cloches pour la chapelle Saint-Mahouarn les 15 mai 1650 et 29 octobre 1673.

« Loc » révèle un lieu de mémoire, Loc Mahouarn est le lieu consacré à Mahouarn. Il peut être le lieu de sa domus, de son domicilium, de sa cellula

Entre 1805 et 1812, sous le rectorat de Corentin Quévarec, la chapelle est détruite car elle était en mauvais état, trop petite et loin du bourg de Cast. La statuaire, l’autel, les pinacles de la tour furent transférés au bourg de Cast. Ce transfert  explique la présence de la statue de saint Mahouarn dans l’église paroissiale Saint-Jérôme de Cast aux côtés de la statue de saint Génite qui eut également sa chapelle détruite au XIXè siècle.

Au Loc’h le placître de la chapelle, la fontaine et son lavoir apparaissent au cadastre de 1849. Les parcelles attenantes sont dénommées : « leurguer-ar-chapel, park-an-illiz-bihan, park-an-illis-vras, leurguer-ar-feunteun, coat-ar-feunteun, leurguer-ar-ster, coat-ar-ster ».

La fontaine et le lavoir de Loc Mahouarn existent encore de nos jours. La fontaine dotée d’une statue de saint Mahouarn fait l’objet de dévotions jusque dans les années 1950.

En 2019, la statue de la fontaine de Loc Mahouarn fut transférée du presbytère de Cast à l’église paroissiale Saint-Jérôme.

Panneau installé à Ménez Laorégen sur les hauteurs du Juch
Statue Saint-Mahouarn en provenance de la fontaine de Loc-Mahouarn (hauteur 60 cm), de nos jours dans l’église paroissiale de Cast
Statue monumentale Saint-Mahouarn réalisée par le sculpteur Goulven JAOUEN, inaugurée en août 2019 sur le site de la Vallée des Saints à Quenequillec en Carnoët (hauteur 4 mètres)
Statue Saint-Mahouarn scellée dans la niche de la fontaine Saint-Mahouarn au bourg de Plomodiern (hauteur 60 cm)